Conscription,  Guerre,  Troisième guerre mondiale

L’Allemagne va procéder à la conscription de 10 000 jeunes hommes dans le cadre d’une conscription fondée sur un questionnaire

Publié par Politico le 12 juin 2024

Le ministre de la défense, Boris Pistorius, a dévoilé son plan pour le retour du service national en Allemagne.

BERLIN – Craignant Moscou, les Allemands seront bientôt invités à préparer la nation à la guerre. Mais ils devront d’abord remplir un questionnaire qui leur parviendra par la poste.

Le ministre de la défense, Boris Pistorius, a dévoilé mercredi [12 juin 2024] un projet de retour au service militaire national, lourd en bureaucratie, en réponse aux prévisions selon lesquelles la Russie pourrait reconstituer ses forces dans les cinq ans à venir pour lancer une nouvelle offensive en Europe.

Le plan Pistorius, qui est actuellement étudié par les législateurs et les partenaires de coalition du ministre, demandera à tous les hommes de 18 ans – les planificateurs prévoient 400 000 hommes par an – de remplir un questionnaire. Sur ce total, quelque 40 000 seront sélectionnés pour subir un examen médical, et 10 000 seront ensuite autorisés à suivre une formation de base.

Pistorius veut agir rapidement et faire signer au moins 5 000 nouveaux soldats l’année prochaine, mais plutôt que de précipiter les corps dans le service actif, il propose d’abord de mettre l’État en ordre de marche pour qu’il puisse embaucher, former et loger les recrues à grande échelle.

« C’est un début », a déclaré modestement M. Pistorius à propos de son plan, qui coûtera 1,4 milliard d’euros dans un premier temps. « Nous mettons en place les processus de recrutement nécessaires à l’augmentation de la taille de nos troupes.

À la fin de la guerre froide, au début des années 1990, la Bundeswehr comptait quelque 500 000 soldats, en plus des réservistes ; trois décennies plus tard, les rangs des soldats à temps plein se sont réduits à un peu plus de 180 000.

Ce déclin est en partie dû aux décennies de paix relative qui ont suivi la guerre froide, mais les mauvaises conditions sont également en cause, a déclaré Eva Högl, députée du parti social-démocrate de M. Pistorius et coordinatrice parlementaire pour les forces armées, au début de l’année.

Eva Högl a estimé le coût de la modernisation des infrastructures militaires allemandes, telles que les casernes, à environ 50 milliards d’euros, soit la moitié du fonds de 100 milliards d’euros que le gouvernement a débloqué l’année dernière pour l’achat de nouveaux équipements militaires.

Pour lancer le processus, M. Pistorius a évité de devoir modifier la constitution, un processus qui prend du temps, en rendant la proposition facultative pour les femmes. Toutefois, son projet devra encore être examiné par le Bundestag, ainsi que par la coalition au pouvoir en Allemagne, de plus en plus fracturée.


Le ministre des finances, Christian Lindner, du parti démocrate libre, a émis un signal positif en déclarant que la proposition de M. Pistorius allait dans la « bonne direction ». Toutefois, les deux hommes se sont opposés sur les projets d’augmentation des dépenses de défense.

Égalité des chances

La recherche d’un moyen de rétablir le service national, supprimé en 2011, est à l’ordre du jour depuis des mois.

M. Pistorius, qui jouit d’une popularité inhabituelle pour un ministre allemand de la défense, a exposé publiquement ses idées lors d’un voyage aux États-Unis en mai. Le mois précédent, les mandarins du Bendlerblock, le complexe du ministère de la défense, avaient présenté trois scénarios, allant de l’inaction à l’instauration d’une conscription obligatoire totale.

Trouver un moyen de ramener le pays au service national – qui a été supprimé en 2011 – est à l’ordre du jour depuis des mois. | Sean Gallup/Getty Images

C’est finalement l’option médiane – un système sélectif de rassemblement de type scandinave – qui a été retenue.

Si les Allemands sont généralement favorables à un retour du service national, le projet n’a pas échappé à la controverse, notamment en ce qui concerne les calculs qui le sous-tendent. M. Pistorius s’est engagé à porter les effectifs de l’armée à 203 000 hommes d’ici à 2031, tandis que son ministère a déclaré mercredi que 260 000 réservistes supplémentaires seraient nécessaires pour défendre correctement le flanc est.

Même si le nouveau plan de conscription est lancé cette année, il est peu probable que le gouvernement parvienne à réunir ces chiffres dans un avenir proche. « Il est difficile de dire quand nous pourrons combler ce fossé », a admis M. Pistorius.

Un officier allemand de haut rang, s’exprimant sous le couvert de l’anonymat pour discuter de sujets sans autorisation, a déclaré qu’il faudrait 272 000 soldats pour défendre de manière crédible les frontières du pays, et que le modèle proposé par Pistorius ne permettrait pas d’atteindre ce total.

Il y a aussi la question de la mise en place d’un système qui met l’accent sur les hommes.

Bien que la Bundeswehr ait un quota de 20 % de femmes, elle est loin d’atteindre cet objectif avec seulement 24 000 femmes soldats (13 %) et seulement deux unités de combat dirigées par des femmes.

Modifier la constitution pour inclure les femmes dans le plan de conscription de Pistorius prendrait du temps et coûterait de l’énergie politique pour le faire passer, a déclaré le ministre.

Mais même si le temps et l’énergie n’étaient pas si rares, il est peu probable que les femmes s’arrachent les postes de l’armée allemande. La Bundeswehr reste un endroit hostile pour les recrues féminines, les cas d’inconduite sexuelle signalés étant passés de 224 en 2020 à 385 en 2023.

Source : https://www.politico.eu/article/german-fear-moscow-prepare-war-paperwork-boris-pistorius-recruitment/