2017 : La Suède rétablit la conscription militaire sur fond de tensions dans la région de la Baltique

Publié en anglais par la BBC le 2 mars 2017

Le gouvernement suédois a décidé de réintroduire la conscription militaire, une décision soutenue par les députés du pays.

La décision signifie que 4 000 hommes et femmes seront appelés à servir à partir du 1er janvier 2018, a déclaré une porte-parole du ministère de la défense à la BBC.

Ils seront sélectionnés parmi environ 13 000 jeunes gens nés en 1999, qui devront se soumettre à une évaluation militaire, a déclaré Marinette Nyh Radebo.

La Suède, pays non aligné, s’inquiète des exercices militaires russes dans la Baltique.

En septembre, une garnison suédoise a été rétablie à Gotland, une grande île située entre le continent suédois et les trois anciens États baltes soviétiques.

Pourquoi cela se produit-il ?

Mme Nyh Radebo a déclaré que le retour à la conscription était motivé par « l’évolution de la sécurité dans notre voisinage ».

« L’annexion illégale de la Crimée par la Russie [en 2014], le conflit en Ukraine et l’augmentation de l’activité militaire dans notre voisinage en sont quelques-unes des raisons.

La conscription suédoise reste toutefois très sélective. Le nombre total de personnes obligées de servir ne représente qu’une petite fraction des plus de 90 000 Suédois qui atteignent l’âge de la conscription chaque année.

Comment cela fonctionnera-t-il ?

Les 13 000 personnes qui passeront les tests militaires seront un mélange de volontaires et de conscrits. « Vous faites partie du système de conscription une fois que vous avez passé les tests – les hommes et les femmes sont traités de la même manière« , a déclaré Mme Nyh Radebo.

« Les autorités choisissent ceux qui sont volontaires, intéressés et motivés.

La durée du service des appelés est de neuf à douze mois. L’objectif est de les encourager à devenir des professionnels militaires ou, plus tard, à rejoindre la réserve.

« Si nous voulons des unités militaires complètes et entraînées, le système de volontariat doit être complété par un service militaire obligatoire« , a déclaré le ministre de la défense, Peter Hultqvist, à la chaîne publique suédoise SVT.

La Suède a connu la conscription militaire jusqu’en 2010, mais auparavant, seuls les hommes étaient enrôlés.

Quel est l’impact sur la sécurité régionale ?

Mme Nyh Radebo a déclaré que « 70 % du Parlement soutient la décision de renforcer l’armée et la coopération avec les pays qui nous entourent ».

La coopération la plus étroite est celle avec la Finlande, a-t-elle ajouté.

La Suède et la Finlande ne font pas partie de l’OTAN, mais coopèrent étroitement avec l’Alliance. Leurs voisins nordiques, la Norvège et le Danemark, font partie de l’OTAN.

Le système de recrutement suédois sera calqué sur celui de la Norvège, a déclaré Mme Nyh Radebo.

Un rapport du gouvernement suédois sur les priorités en matière de défense pour la période 2016-2020 indique que le recrutement de chefs d’escadron, de soldats et de marins de réserve « s’est avéré problématique ».

Le rapport détaille une série de mesures visant à renforcer les capacités militaires suédoises, citant « la détérioration de la situation sécuritaire en Europe, en particulier à la lumière de l’agression russe contre l’Ukraine ». L’approfondissement de la coopération avec la Finlande en matière de défense est « essentiel », selon le rapport.

Selon une étude réalisée en 2015 par Barbara Kunz du Centre d’études de sécurité de l’IFRI, la Suède compte environ 52 000 militaires à temps plein, dont 20 000 font partie du personnel permanent et la plupart des autres sont des membres de la Garde nationale.

Quels sont les autres pays européens qui pratiquent la conscription ?

La plupart des 28 États membres de l’UE ont aboli la conscription militaire. La France et le Royaume-Uni, principaux piliers de la défense de l’OTAN en Europe occidentale, ont professionnalisé leurs forces armées (la France en 2001, le Royaume-Uni en 1963).

L’Allemagne a suspendu la conscription en 2011, mais une disposition à cet effet figure toujours dans la constitution. La réintroduction d’une forme de service national fait actuellement l’objet d’un débat.

Pendant la guerre froide, le service national permettait à l’Allemagne de l’Ouest de mobiliser 495 000 soldats et d’en porter le nombre à environ 1,2 million si nécessaire avec des réservistes.

La Turquie possède les deuxièmes plus grandes forces armées de l’OTAN, après l’armée américaine. La Turquie impose la conscription à tous les hommes de plus de 20 ans. Ils doivent servir entre six et quinze mois.

La Grèce voisine, partenaire de l’OTAN, impose un service militaire obligatoire (neuf mois) aux hommes à partir de 19 ans. Chypre, qui est depuis longtemps une source de tension entre la Grèce et la Turquie, impose également la conscription.

Le Danemark et la Norvège ont une conscription limitée, mais leurs forces armées sont essentiellement composées de professionnels. L’Estonie et la Lituanie – de petits États baltes qui se méfient des mouvements russes près de leurs frontières – ont des politiques de recrutement similaires.

La Finlande, quant à elle, exige de tous les hommes âgés de 18 ans qu’ils servent jusqu’à 347 jours dans les forces armées. Ils sont ensuite considérés comme des réservistes et peuvent être tenus de suivre des cours de recyclage militaire. Pour les femmes, le service militaire est volontaire.

En Russie, tous les hommes âgés de 18 à 27 ans doivent passer un an dans les forces armées.

L’Ukraine a rétabli la conscription en 2014, lorsque les tensions avec la Russie se sont intensifiées.

La Suisse applique un système de milice, dans lequel les hommes doivent effectuer des périodes de service dans les forces armées entre 19 et 34 ans, et garder leur équipement à la maison.

Source en anglais : https://www.bbc.com/news/world-europe-39140100