« Un nouveau cadre pour servir au sein de nos armées » : vers le retour d’un service militaire en France ?
Publié par Charente Libre le 25 novembre 2025
Il ne s’agit pas d’« envoyer nos jeunes en Ukraine », assure Emmanuel Macron qui doit préciser ce jeudi [27 novembre 2025] l’instauration d’un nouveau service national volontaire.
Emmanuel Macron se rendra ce jeudi à la 27e Brigade d’infanterie de montagne (BIM) à Varces (Isère), afin d’annoncer un « nouveau cadre pour servir au sein de nos armées » et répondre à l’« envie d’engagement » de la jeunesse. « Il est très clair que nous devons renforcer le pacte armée-Nation », a plaidé mardi le chef de l’État.
Un objectif à terme de 50.000 volontaires par an ?
Emmanuel Macron a assuré sur RTL que le nouveau service national volontaire qu’il s’apprête à annoncer n’implique aucunement d’« envoyer nos jeunes en Ukraine ». Il a confirmé qu’il préciserait jeudi [27 novembre 2025] « la transformation du service national universel vers une nouvelle forme », sans fournir plus de précisions. « Il faut vraiment, en tout cas tout de suite, supprimer toute idée confuse qui consisterait à dire qu’on va envoyer nos jeunes en Ukraine. C’est pas du tout le sens de cette affaire », a-t-il insisté.
Sa mise en œuvre devrait commencer modestement, avec 2.000 à 3.000 personnes la première année, avant une « montée en puissance » et un objectif à terme de 50.000 volontaires par an, estimait récemment une source ayant connaissance du dossier. D’après plusieurs médias, la durée envisagée serait de 10 mois et il serait rémunéré à hauteur de plusieurs centaines d’euros.
La mobilisation sur la base du volontariat d’une partie d’une classe d’âge pourrait servir à répondre aux besoins d’« acquérir la masse » nécessaire pour tenir dans la durée en cas de conflit, avait estimé cet été le général Pierre Schill, chef d’état-major de l’armée de Terre.
Se disant « pas totalement opposé » à un tel type de service militaire, le premier secrétaire du PS Olivier Faure a cependant regretté sur franceinfo que « ça ne rempli (sse) pas complètement sa mission », en terme social, puisqu’il sera « essentiellement proposé à ceux qui sont dans des situations moins enviables » alors que le service militaire d’autrefois « brassait les populations ».
Le service militaire a été obligatoire en France pendant près de deux siècles jusqu’à sa suppression en 1997 par le président Jacques Chirac pour laisser place à une armée de métier.
De la conscription obligatoire au SNU
• 1798: conscription obligatoire.
En 1798, la loi Jourdan-Delbrel instaure la conscription obligatoire. Née de l’idéal révolutionnaire d’un peuple formé de « citoyens soldats », cette loi constitue le fondement du service militaire en France.
À compter de 1804, un système de tirage au sort est instauré : sur 100 hommes, seuls 35 sont appelés à servir. Les conscrits sont tirés au sort parmi les célibataires ou veufs sans enfant de 20 à 25 ans. Un système du remplacement permet de payer pour échapper à la conscription qui dure alors six ans.
La notion d’universalité apparaît en 1889 : le service militaire concerne toutes les strates de la population masculine. En 1905, la sélection par tirage au sort est abandonnée et la durée du service réduite à deux ans. En 1913, il passe à trois ans : 8,5 millions de Français sont mobilisés pour la guerre de 1914-1918.
Revenu à douze mois en 1928, puis allongé à deux ans en 1935, le service militaire envoie cinq millions d’hommes sous les drapeaux en 1939. Entre 1954 et 1962, la guerre d’Algérie mobilise un million d’appelés pouvant servir jusqu’à 30 mois. Le service militaire devient le « service national » en 1965 avec la loi Messmer. Il passe à 12 mois en 1970, puis à dix en 1992.
• 2001: plus d’appelés dans les casernes
En 1996, le Président Jacques Chirac annonce la professionnalisation des armées. Toutefois la loi du 28 octobre 1997 ne fait que « suspendre » le service national, précisant qu’il peut être « rétabli à tout moment […] dès lors que les conditions de la défense de la Nation l’exigent ». Le service militaire cesse en pratique le 29 novembre 2001 avec la libération des derniers appelés sous les drapeaux.
Depuis 2002, filles et garçons français doivent se faire recenser à 16 ans et suivre une journée de préparation à la défense dans leur 18e année : c’est la Journée défense et citoyenneté (JDC).
Si le service national est aboli dans sa forme classique, d’autres formes d’engagement civique subsistent, avec des finalités plus sociales que militaires. Ainsi en 2010, une loi crée pour les 16-25 ans un « service civique » pour des missions d’intérêt général, d’une durée de 6 à 12 mois, indemnisé. En quinze ans, il a concerné plus de 875.000 jeunes, selon l’Agence du service civique.
• 2019: lancement du SNU
L’idée d’un service militaire pour renforcer le lien entre jeunes, Nation et armée, est relancée après les attentats de 2015. Pendant la campagne présidentielle de 2017, Emmanuel Macron promet de rétablir un « service national obligatoire et universel ». Lancé en 2019 sous la forme d’une expérimentation, le Service national universel (SNU) concerne des jeunes volontaires, filles et garçons, âgés de 15 à 17 ans. Il comporte une « mission d’intérêt général » et un « séjour de cohésion » comprenant des activités sportives, culturelles et intellectuelles, avec des journées qui débutent par la « levée des couleurs » (drapeau et hymne national) et le port de l’uniforme. Le SNU a concerné 40.000 jeunes en 2023 pour les « séjours de cohésion ».


