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Responsabilité de l’État et indemnisation des soignants suspendus – Article par Me David GUYON

Publié par le site de Me Guyon le 22 décembre 2025

La responsabilité de l’État désigne l’obligation de réparer les dommages causés par son action ou son inaction, avec ou sans faute. La reconnaissance de la responsabilité de l’Etat par le juge administratif permet l’indemnisation des victimes.

Il existe deux fondements juridiques à la responsabilité de l’Etat. Le premier fondement est celui de la responsabilité pour faute. L’Etat ou l’administration (Commune, département, Région, Etablissement public) peut mal agir.

La responsabilité sans faute est un argument qui permet d’engager la responsabilité de l’administration sans exiger l’existence ou la preuve d’une faute. Cette idée repose sur la solidarité nationale ou le risque.

La responsabilité de l’État repose aujourd’hui sur des mécanismes nouveaux. Ils sont construits à la fois par le juge et par le pouvoir législatif. Ils permettent la reconnaissance de droits à réparation au profit du demandeur.

La responsabilité de l’État peut être engagée à raison d’un retard, d’une erreur, ou d’une abstention ou d’un dysfonctionnement persistant sur une période longue, dès lors que le préjudice est directement lié à l’action publique. 

C’est une idée assez récente que de considérer que l’Etat peut être responsable.

Pourquoi l’Etat est responsable ?

L’État est responsable car, dans une logique de socialisation du risque, il lui revient de réparer les préjudices causés, non seulement en cas de faute, mais aussi pour garantir l’indemnisation des victimes lorsque l’activité administrative crée une rupture d’égalité devant les charges publiques, même sans comportement fautif.

Historiquement, sous l’Ancien Régime, l’État n’était pas tenu à réparation des dommages causés par ses actes. Toute prise en charge de préjudices relevait d’une faveur, expression de la magnanimité du souverain, et non d’un droit. Le roi étant juridiquement « infaillible » (« Le roi ne peut mal faire »), il n’existait pas de responsabilité juridique de la puissance publique.

Cette idée d’irresponsabilité s’est maintenue jusqu’au 19ème siècle. Progressivement, la responsabilité de l’Etat s’est vu de plus en plus engager.

Au XIXe siècle, le principe d’irresponsabilité de l’État subsiste en droit civil, mais la jurisprudence administrative pose progressivement les bases d’une responsabilité propre à l’administration. 

L’arrêt fondateur Blanco du Tribunal des conflits (8 février 1873) marque la naissance du droit de la responsabilité administrative : il affirme que la responsabilité de l’État obéit à des règles spécifiques, distinctes du droit civil, en raison des missions de service public qu’il assume.

Pourtant, beaucoup de non concitoyens pensent encore à tort, que l’Etat est irresponsable. Pis encore, qu’il s’agit du pot de fer contre le pot de terre.

C’est un tort car l’administration se trouve de plus en plus tributaire d’une obligation de bien faire. Le rapport du Conseil d’Etat en 2004 sur « la socialisation du risque » en est un exemple.

De plus en plus il y a l’idée qu’il doit toujours y avoir un responsable. La société refuse la fatalité.

Récemment, c’est les évènements de Nouvelle Calédonie qui ont donné lieu à la condamnation de l’Etat pour sa gestion défaillante des émeutes.

Quelles sont les conditions d’engagement de la responsabilité de l’Etat ?

La responsabilité de l’État peut être engagée lorsqu’un dommage est subi par une victime.

La doctrine considère que trois conditions doivent être réunies. Nous considérons qu’il en existe une quatrième.

L’existence d’une faute

La responsabilité de l’État peut être recherchée et prouvée lorsqu’une faute est imputable à une autorité ou à un service public.

Il peut s’agir d’un manquement commis par l’administration. 

Ce manquement peut être causée par une action ou d’une carence dans le fonctionnement normal du service public. Cette responsabilité suppose toujours l’identification d’un élément imputable à l’État, distinct d’une simple erreur humaine, et relève de la compétence de la juridiction administrative.

La faute se définit comme le manquement à une obligation préexistante, selon Marcel PLANIOL, civiliste.

Cette faute peut résulter d’une action ou d’une abstention contraire au droit, à la loi ou à une obligation issue d’un article.

Dans certain cas, l’existence d’une faute n’est pas une condition. On parle alors de responsabilité sans faute.

Comme il s’agit de l’administration, c’est le juge administratif qui est compétent pour connaître de ce litige.

Bien sur, dans certains cas, la loi peut considérer que le juge judiciaire peut être compétent.

A titre d’exemple, les mesures de soins sans consentement, bien qu’issue de l’administration (préfet ou hôpital) sont jugés par le juge de la liberté et de la détention.

La preuve d’un préjudice

L’engagement de la responsabilité de l’État suppose également l’existence d’un préjudice réel, certain et personnel.

Cela signifie que la victime doit se prévaloir d’un dommage effectivement subi. 

Ce préjudice peut être matérielcorporelmoral, ou consister en une perte de chance. Il doit répondre à trois critères : être certaindirect (résultant d’un fait imputable à l’État ou au service public) et personnel (ressenti directement par la personne qui agit en justice).

Le juge administratif ou judiciaire apprécie souverainement la réalité et l’étendue du dommage, en s’appuyant sur des éléments concrets : pièces médicales, attestations, justificatifs financiers, expertises, etc. En l’absence de preuve suffisante du préjudice, l’action en indemnisation est rejetée, même en cas de faute avérée.

Le lien de causalité

Il doit être établi que le dommage a été directement causé par le comportement fautif ou l’activité du service public. 

De plus, c’est le juge qui apprécie souverainement le lien de causalité.

Il devra déterminer si le préjudice résulte du comportement de l’administration.

La prescription

Enfin, l’action en responsabilité contre l’État doit être exercée dans le délai de prescription prévu par le droit. 

Pour rappel, il s’agit d’une prescription quadriennale.

Passé ce délai la victime perd son droit à réparation. 

Comment engager la responsabilité de l’État ?

Pour engager concrètement la responsabilité de l’État, la victime doit adresser une réclamation à l’autorité administrative en démontrant un dommage causé, un préjudice subi, un lien de causalité, et, en l’absence de réparation, saisir le juge compétent dans le délai de prescription prévu par la loi.

Votre demande doit comprendre les éléments suivants.

Préciser le fondement juridique de la responsabilité de l’État

La responsabilité de l’État repose sur un principe général selon lequel toute autorité administrative est tenue de réparer les conséquences dommageables de son action ou de son inaction. 

Cette responsabilité peut être fondée sur une faute.  Dans certains cas, elle peut être fondée sur une responsabilité sans faute.

C’est le cas lorsque le préjudice causé résulte d’une rupture d’égalité devant les charges publiques.

Ainsi, les soignants suspendus sont un exemple de responsabilité sans faute. La loi du 5 août 2021, sauf condamnation par la CEDH, est considérée comme légale. Cependant les conséquences dommageables ont été terribles.

C’est légal mais pas moral ! 

C’est pourquoi ce régime de responsabilité permet aux soignant suspendus de réclamer une indemnisation.

Prouver la faute

C’est au demandeur, la victime, qui doit prouver la faute. 

Dans certains cas, le juge admet une présomption de responsabilité, notamment lorsque le dommage présente un caractère anormal ou une particulière gravité, ce qui allège la charge de la preuve pesant sur le demandeur.

Préciser la nature et le montant des préjudices

Dans toute procédure tendant à l’engagement de la responsabilité de l’État, la victime doit impérativement préciser la nature et le montant des préjudices dont elle demande réparation

Cette exigence répond à une logique de clarté et de rigueur procédurale.

Ainsi, c’est au demandeur d’établir l’existence d’un dommage causé, son lien avec l’action ou l’inaction de l’autorité administrative, et son évaluation chiffrée.

La nature des préjudices désigne leur typologie. Ils peuvent être :

  • Matériels : perte de revenus, frais médicaux, dégâts sur un bien, etc. ;
  • Corporels : atteintes à l’intégrité physique, handicap, invalidité ;
  • Moraux : souffrances psychiques, atteinte à la réputation, perte d’un proche ;
  • Préjudices d’agrément : impossibilité de pratiquer des activités habituelles ;
  • Préjudices économiques : perte de chance, perte d’un marché, frais de reconstitution.

Pour obtenir réparation des préjudices causés, la victime doit tout justifier.

En pratique chacun de ces préjudices sera démontré par tous moyens de preuve : facturescertificats médicauxexpertisestémoignages, ou encore attestations d’experts.

Le courrier de demande indemnitaire préalable

Votre demande d’indemnisation prend la forme d’un courrier recommandé, écrit en français et signé adressé au premier ministre. Il s’agit d’une démarche amiable.

L’engagement de la responsabilité de l’État suppose d’abord une réclamation préalable adressée à l’administration concernée. 

En l’absence de réponse dans un délai de deux mois, ou en cas de refus, la victime peut engager une action devant le juge administratif.

Il s’agit du juge compétent pour trancher les litiges impliquant le service public.

En pratique, la demande peut être faite, avant le contentieux. Cependant, il est possible de la faire en même temps que la saisine du juge. Pis encore, il est possible de régulariser en cours de procédure.

L’important est que le juge se prononce sur une décision de rejet, implicite ou exprès qui existe au jour où il statue.

Le respect du délai de prescription

L’action en responsabilité doit être introduite dans les délais fixés par la loi.

Ainsi la loi du 31 décembre 1968 fixe un délai de quatre ans à compter du fait générateur. 

Le non-respect de ce délai entraîne l’irrecevabilité de la demande, même si les conditions de fond sont réunies.

En conclusion, engager la responsabilité de l’État peut paraître simple, mais c’est en réalité complexe.

La faute de l’Etat tirée de lois inconstitutionnelles ?

L’État peut voir sa responsabilité engagée du fait d’une loi inconstitutionnelle.

Lorsqu’une personne est victime d’un dommage causé par une loi, elle peut parfois demander une indemnisation à l’État. C’est ce qu’on appelle l’engagement de la responsabilité de l’État. Mais que se passe-t-il lorsque cette loi est ensuite jugée contraire à la Constitution ? Est-ce qu’on peut obtenir une réparation des préjudices subis du fait de cette violation manifeste du droit ?

Une loi inconstitutionnelle peut, dans certains cas, engager la responsabilité de l’État

Lorsqu’une loi est jugée contraire à la Constitution, elle est censurée par le Conseil constitutionnel. 

Cette censure intervient à deux moments possible : 

– soit avant sa promulgation (article 61 de la Constitution), 

soit après, dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) (article 61-1). 

Depuis trois décisions du Conseil d’État rendues le 24 décembre 2019 (Paris ClichyParis Eiffel SuffrenLaillat), un nouveau régime a été reconnu : celui de la responsabilité de l’État du fait des lois inconstitutionnelles.

 Il s’ajoute aux régimes classiques fondés sur l’égalité devant les charges publiques (La Fleurette, 1938) et sur la violation d’un engagement international (Gardedieu, 2007).

Ce régime repose sur une idée simple mais puissante.

Si l’État fait appliquer une loi qui viole la Constitution, et que cette application cause un préjudice, il peut être tenu de réparer ce dommage. 

Ce principe découle des exigences de la hiérarchie des normes, où la Constitution prévaut sur toutes les autres règles.

Une responsabilité très encadrée par le juge constitutionnel et administratif

L’engagement de la responsabilité de l’État du fait d’une loi inconstitutionnelle n’est pas automatique. 

Il est soumis à des conditions très strictes, fixées à la fois par le Conseil d’État et le Conseil constitutionnel :

  • Il faut une décision juridictionnelle explicite du Conseil constitutionnel déclarant une disposition législative inconstitutionnelle, dans le cadre d’une QPC ou d’un contrôle a priori.
  • Il faut que cette décision ne s’oppose pas à l’indemnisation des effets passés de la loi. En effet, selon l’article 62 de la Constitution, le Conseil peut exclure ou limiter les possibilités d’obtenir réparation.
  • Il faut démontrer un préjudice causé, direct, personnel et réel, ainsi qu’un lien de causalité strict entre ce préjudice et l’application de la loi inconstitutionnelle.

En pratique, ces conditions sont appréciées de façon rigoureuse par les juridictions, et de nombreuses demandes échouent faute de pouvoir établir ce lien direct.

Une responsabilité qualifiée de « faute objective », mais juridiquement sui generis

Même si le Conseil d’État ne parle pas expressément de « faute », de nombreux juristes considèrent qu’une loi inconstitutionnelle révèle une faute législative : une violation manifeste du droit, qui s’apparente à une transgression d’une obligation constitutionnelle préexistante. On parle alors de faute objective, même si le juge préfère parler d’un régime « sui generis » pour éviter de remettre en cause la légitimité du législateur.

En pratique, pour la victime, peu importe la qualification théorique : ce qui compte, c’est la possibilité d’obtenir la réparation des préjudices subis. Encore faut-il agir dans le respect du délai de prescription quadriennal (quatre ans), qui commence à courir dès que la personne connaît l’existence et l’étendue de son dommage, et non à la date de la décision d’inconstitutionnalité.

Ce régime spécifique constitue une avancée importante pour la protection des droits fondamentaux, tout en respectant l’équilibre entre les pouvoirs publics. Il permet d’assurer qu’une loi inconstitutionnelle ne reste pas sans conséquence lorsqu’elle a porté atteinte à des droits individuels.

La faute de l’État tirée de lois inconventionnelles ?

Oui, l’État peut être condamné pour avoir méconnu un traité international ou une convention internationale.

Ainsi, lorsqu’une loi française est contraire à un engagement international de la France, l’État peut être condamné. 

La condamnation conduira à indemniser les personnes qui ont subi un préjudice du fait de cette loi. Cette responsabilité est aujourd’hui clairement admise par le juge administratif.

Vous devez bien distinguer deux régimes.

Dans La Fleurette (1938), la loi est régulière mais cause un préjudice anormal et spécial : l’indemnisation repose sur l’égalité devant les charges publiques.


Dans Gardedieu CE 2007, la loi est irrégulière car inconventionnelle. Dans ce cas l’indemnisation repose sur la violation de la hiérarchie des normes. Cette condamnation ouvre droit à une réparation intégrale, sans exigence de préjudice grave et spécial.

Quelles sont les formes de responsabilité administrative ?

Les formes de responsabilité administrative sont la responsabilité pour faute et la responsabilité sans faute.

Ces règles sont différentes des litiges entre particuliers, considéré comme du droit commun.

On utilise le terme « droit commun » en opposition au droit administratif, considéré comme du droit dérogatoire.

Responsabilité pour faute

Vous êtes en présence d’une responsabilité pour faute lorsque le dommage subi trouve son origine dans un comportement fautif de l’administration. 

Cette faute peut résulter d’une action illégale, d’une abstention fautive, d’une mauvaise organisation du service ou d’une décision contraire aux normes juridiques applicables. 

Le principe selon lequel toute illégalité constitue une faute est affirmé par l’arrêt CE, 27 janvier 1973, Driancourt

La responsabilité pour faute demeure la forme classique et dominante de la responsabilité administrative.

Responsabilité sans faute fondée sur le risque

Vous devez retenir que l’administration peut être tenue responsable même en l’absence de toute faute lorsqu’elle fait courir à certains administrés un risque particulier. 

Cette responsabilité repose sur l’idée que celui qui crée un risque doit en assumer les conséquences. 

Elle s’applique notamment en cas de dommages causés par des activités dangereuses, par l’utilisation de choses ou ouvrages publics présentant un danger exceptionnel, ou encore par la collaboration occasionnelle au service public.

Cette construction jurisprudentielle trouve son origine dans l’arrêt CE, 21 juin 1895, Cames.

Responsabilité sans faute fondée sur la rupture d’égalité devant les charges publiques

Vous êtes dans cette hypothèse lorsque l’administration, par une décision légale prise dans l’intérêt général, impose à un administré une charge anormale et spéciale que celui-ci ne peut raisonnablement supporter seul. 

Le dommage est alors réparé non en raison d’une faute, mais pour rétablir l’égalité entre les citoyens. 

Ce fondement a été consacré par le Conseil d’État dans l’arrêt CE, 14 janvier 1938, Société La Fleurette, puis confirmé dans une jurisprudence constante.

Responsabilité du fait des lois

Vous devez distinguer une forme particulière de responsabilité sans faute lorsque le dommage résulte directement de l’application d’une loi. Bien que la loi soit par nature légale, elle peut causer un préjudice grave et spécial à certaines personnes. Le juge administratif accepte alors d’indemniser la victime au nom de la rupture d’égalité devant les charges publiques, comme l’a affirmé le Conseil d’État dans l’arrêt CE, 14 janvier 1938, Société La Fleurette et précisé ultérieurement par l’arrêt CE, 8 février 2007, Gardedieu en cas de loi contraire aux engagements internationaux.

Responsabilité du fait des décisions juridictionnelles

Vous êtes confrontés à cette forme de responsabilité lorsque le fonctionnement défectueux de la justice administrative ou judiciaire cause un dommage. En matière administrative, cette responsabilité demeure exceptionnelle et suppose en principe une faute lourde ou un déni de justice, conformément à l’article L. 141-1 du Code de l’organisation judiciaire et à la jurisprudence du Conseil d’État, notamment CE, 29 décembre 1978, Darmont.

Responsabilité du fait des agents publics

Vous devez enfin prendre en compte la responsabilité de l’administration du fait des agissements de ses agents. Lorsque la faute est une faute de service, la responsabilité de l’administration est pleinement engagée. En cas de faute personnelle non dépourvue de lien avec le service, un cumul de responsabilités entre l’agent et l’administration est possible, selon la jurisprudence issue notamment des arrêts CE, 26 juillet 1918, Époux Lemonnier et CE, 28 juillet 1951, Delville.

Quelles sont les types de faute commises par l’État ?

Il existe toute une série de faute conduisant à la condamnation de l’État.

Faute de service

Vous êtes en présence d’une faute de service lorsque le dommage résulte d’un dysfonctionnement du service public, indépendamment de toute intention personnelle de l’agent. Cette faute est imputable à l’administration elle-même et engage directement sa responsabilité.

Elle peut résulter d’une mauvaise organisation du service, d’une décision illégale, d’une carence, d’une négligence ou d’une imprudence dans l’action administrative. Cette notion est issue de la jurisprudence fondatrice du Tribunal des conflits, notamment l’arrêt TC, 8 février 1873, Blanco, qui consacre l’autonomie du droit de la responsabilité administrative.

Faute personnelle

Vous devez qualifier de faute personnelle celle qui révèle un comportement de l’agent détachable de l’exercice de ses fonctions, par son intention, sa gravité ou son caractère étranger au service. Cette faute engage en principe la responsabilité personnelle de l’agent devant le juge judiciaire. 

La distinction entre faute personnelle et faute de service a été posée par le Tribunal des conflits dans l’arrêt TC, 30 juillet 1873, Pelletier

Toutefois, cette faute peut parfois être cumulée avec une faute de service.

Faute personnelle non dépourvue de lien avec le service

Vous êtes dans cette hypothèse lorsque la faute de l’agent, bien que personnelle, est commise à l’occasion ou dans le cadre du service. Le juge admet alors un cumul de responsabilités entre l’administration et l’agent. 

La victime peut rechercher la responsabilité de l’administration, qui dispose ensuite d’une action récursoire contre l’agent. 

Cette solution a été consacrée par le Conseil d’État dans l’arrêt CE, 26 juillet 1918, Époux Lemonnier.

Faute simple

Vous devez retenir la faute simple lorsque l’administration a manqué à ses obligations sans que ce manquement atteigne un degré particulier de gravité. 

La faute simple suffit aujourd’hui à engager la responsabilité de l’administration dans la majorité des domaines, y compris ceux qui exigeaient autrefois une faute lourde. 

Cette évolution jurisprudentielle traduit une volonté de meilleure protection des victimes, notamment illustrée par l’arrêt CE, 10 avril 1992, Époux V. en matière médicale.

Faute lourde

Vous êtes en présence d’une faute lourde lorsque le comportement de l’administration révèle une inaptitude caractérisée à accomplir la mission confiée. 

Longtemps exigée dans de nombreux secteurs, la faute lourde n’est désormais requise que dans des domaines spécifiques présentant une complexité particulière, comme certaines activités de contrôle ou de police administrative dans des circonstances exceptionnelles. 

Le Conseil d’État a progressivement restreint son champ d’application.

Illégalité fautive

Vous devez identifier une illégalité fautive lorsque l’administration adopte un acte ou un comportement contraire à une norme juridique et que cette illégalité est constitutive d’une faute engageant sa responsabilité. Le principe selon lequel toute illégalité constitue une faute est affirmé de manière constante depuis l’arrêt CE, 27 janvier 1973, Driancourt

Il suffit alors de démontrer un préjudice et un lien de causalité.

Faute par abstention ou carence fautive

Vous êtes confrontés à une faute par abstention lorsque l’administration s’abstient d’agir alors qu’elle avait l’obligation juridique de le faire. Cette carence peut concerner la prévention des risques, le contrôle ou la réglementation. 

Le Conseil d’État a reconnu ce type de faute notamment en matière sanitaire ou environnementale, par exemple dans l’arrêt CE, Ass., 3 mars 2004, Ministre de l’Emploi et de la Solidarité c/ Consorts X relatif à l’amiante.

Faute résultant de la violation d’un engagement international ou européen

Vous devez enfin retenir qu’une violation d’un traité international, d’une convention européenne ou du droit de l’Union européenne peut constituer une faute engageant la responsabilité de l’État. 

Le juge administratif admet cette responsabilité, soit sur le terrain de la faute, soit sur un régime spécifique.

Ainsi voir l’arrêt CE, Ass., 8 février 2007, Gardedieu en cas de méconnaissance d’un engagement international par la loi elle-même.

Faute contractuelle

La Responsabilité contractuelle de l’État permet au cocontractant de l’administration d’obtenir justice.

La responsabilité contractuelle de l’État peut être engagée lorsque l’exécution d’un contrat administratif porte une atteinte aux droits du cocontractant. 

Vous devez alors démontrer qu’il existe un lien de causalité entre le comportement de l’administration et le dommage subi. 

Ce régime nécessite de remplir des conditions classiques, qui constituent les principes fondamentaux de toute action en responsabilité, à savoir un fait imputable à l’État, un préjudice et un lien direct entre les deux.

Responsabilité de l’État du fait d’une décision de justice ? 

Vous devez retenir que la responsabilité de l’État peut être engagée à raison du fonctionnement défectueux du service public de la justice. 

Vous devez retenir que l’État ne peut pas être tenu responsable du simple contenu d’une décision juridictionnelle, même erronée en droit ou en fait. Les erreurs d’appréciation relèvent des voies de recours ordinaires et non de l’action en responsabilité. 

Ce principe vise à préserver l’autorité de la chose jugée et l’indépendance du juge, qui constituent des éléments fondamentaux de l’État de droit.

Source : https://www.guyon-avocat.fr/droit-administratif/responsabilite-de-letat/